Chrétiens Orientaux sur France 2, une émission des Églises orientales catholiques et orthodoxes présentes en France. Vie et Foi des Chrétiens d’Orient.

jubilé de Saint Nicolas de Myre à Marseille

Homélie de Sa Béatitude Joseph Absi, patriarche grec Melkite Catholique, à l’occasion du bicentenaire de l’église Saint-Nicolas de Myre Marseille

Chers amis,

Je suis très heureux d’être parmis vous ce matin pour célébrer ensemble le bicentenaire de notre église Saint-Nicolas de Myre, en même temps que l’achèvement presque total des travaux de restauration. Je vous remercie pour l’accueil chaleureux que vous m’avez réservé pour cette sainte et heureuse occasion tant attendue.

A regarder la splendeur de cette église, nous pensons à la grande foi de nos aïeux qui les a poussés à la construire, en même temps qu’à leur attachement à leurs traditions et rites liturgiques qui nourrissaient cette foi dont ils étaient fiers et qu’ils ont maintenue saine et sauve au prix de leur sang.

Aussi, n’est-il pas vain que la liturgie se souvienne d’eux tous les jours. Ce sont eux que nous célébrons par ce bicentenaire. Le jubilé est le leur. Ils sont à l’heure présente parmi nous. Leurs visages couvrent les murs de cette église comme des icônes. Leurs voix retentissent sous ses voûtes comme des chants de chérubins.

Plus de Deux cents ans se sont écoulés depuis qu’ils débarquèrent sur le port de Marseille. Ils étaient les premiers hommes et femmes à quitter leur pays pour de nouvelles terres. Ils ont formé la première vague d’émigration melkite dans les temps modernes. D’autres vagues ont suivi surtout vers l’Egypte, les deux Amériques et l’Australie. Marseille était sans doute un point de débarquement important par sa proximité des pays de l’est de la méditerranée et par ses affinités avec les gens de ces pays.

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En ce temps-là presqu’inaperçue, limitée et ne posant pas de problème, l’émigration prend de nos jours beaucoup d’ampleur et pose des problèmes. Nos fidèles, les jeunes surtout, émigrent en grand nombre vers tous les coins du monde. Chaque vague, chaque ère d’émigration a ses causes, ses difficultés, ses objectifs et espérances. Une chose cependant est commune, un fil relie toutes ces émigrations, un désir fort et peut-être inexplicable pour quelques-uns : la volonté de se faire construire une église. Lorsque nos pères sont venus à Marseille ils avaient, comme nous avons, nous aussi actuellement, l’embarras de choix des églises pour y aller prier. Malgré cela ils voulaient avoir une église propre où se réunir. Pourquoi ? parce que l’église seule peut les réunir, les rassembler, leur garder leur identité et les faire éprouver et manifester leur force et leur appartenance. Ils venaient de régions, de villes, de villages, de quartiers différents, mais ils avaient une seule et même foi, une seule et même église.

Ce n’est pas avec un esprit de ghetto, de refus de l’autre, mais avec la fierté d’appartenir à une Eglise apostolique, une Eglise de martyrs, une Eglise capable de les éduquer dans la foi orthodoxe catholique et de les conduire vers le bonheur éternel.

Quand cette église fut construite, en 1821, la cathédrale de Damas, le siège patriarcal, n’existait pas encore, ni d’autres Cathedrales melkite non plus. La liberté religieuse qui se trouvait à Marseille était absente dans notre région soumise alors aux autorités ottomanes qui n’étaient pas favorables aux chrétiens. Autant dire l’importance historique et symbolique de l’église Saint-Nicolas de Myre, l’importance surtout aux yeux de la communauté melkite à Marseille qui l’a construite. Ce qu’ils n’avaient pas pu accomplir dans leur propre terre ils ont pu le faire ici. C’est pourquoi ils ont vu dans la construction de cette église un souffle d’air frais, un souffle de liberté dans le pays de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. En faisant cela ils ont formé, sans doute à leur insu, la première communauté melkite dans la diaspora, non seulement en Europe, mais également au Canada, en Australie et dans les deux Amériques où ils sont actuellement en grand nombre. Et par là ils furent dans le même temps les premiers à manifester à leurs frères d’Occident les richesses de leur Eglise.

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Depuis quelques années on parle beaucoup de l’émigration des chretiens d’Orient. On met surtout en relief les défis qu’ils affrontent : l’apprentissage de la langue, l’acquisition d’un travail, et d’un logement, le changement de milieu culturel, social, religieux… La différence des valeurs surtout familiales et religieuses, le déchirement entre le retour à la patrie et l’installation définitive dans le nouveau pays. Un point important cependant est à souligner, c’est que la plupart de nos fidèles ont pu surmonter ces défis et s’intégrer à la nouvelle vie des pays où ils se sont installés. Ils sont devenus des citoyens à part entière, des facteurs actifs participant à la construction et à la prospérité des pays qui les ont accueillis. Preuve en est, par exemple, nos fidèles qui sont à Marseille et qui fêtent aujourd’hui non seulement le bicentenaire de leur église mais leur propre bicentenaire.

En effet, la célébration du bicentenaire est la célébration de la mémoire de tous ceux et de toutes celles qui ont passé par cette église depuis deux cents ans. Combien de nos ancêtres y ont reçu le baptême, la communion, le mariage et, au terme de leur vie, les prières de la communauté Saint-Nicolas de Myre les accompagnèrent jusqu’à la demeure éternelle. L’église Saint-Nicolas de Myre c’est eux. Une église vivante et fervente depuis deux cents ans. Nous rendons grâce à Dieu pour tout cela.

Le jubilé n’est cependant pas cela seulement. Il n’est pas seulement une mémoire. Il est aussi un regard vers l’avenir. De même que la restauration de l’église n’est pas seulement pour conserver quelque chose d’antique mais pour marquer et commencer une nouvelle étape, un nouvel élan vers l’avenir. La restauration, le bicentenaire c’est pour signifier que nous continuons à marcher, à avancer, à rêver, à vivre. C’est un signe d’espérance.

La paroisse melkite de Marseille, qui est la plus ancienne de nos paroisses en Europe, est appelée à se rajeunir, à occuper la place qui lui revient dans la vie ecclésiale de Marseille. Elle pourrait jouer le rôle que notre Eglise en général joue depuis sa naissance, être un pont entre les différentes communautés tant sur le plan oeucuménique que sur celui des relations islamo-chrétiennes. La paroisse Saint-Nicolas de Myre devrait être un foyer de rayonnement de l’Eglise melkite, un témoin de l’enrichissante diversité dans l’Eglise universelle. C’est peut-être ça sa raison d’être de nos jours. Non au ghetto, non au fanatisme, non au repliement sur soi-même. Au contraire. Notre Eglise est une Eglise qui ne connaît ni ne reconnaît, en son sein ni au-dehors, de frontières tant ethniques que culturelles ou historiques ou patriotiques.

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C’est avec cette perspective que nous débutons aujourd’hui le troisième centenaire de l’église Saint-Nicolas de Myre. Notre nombre est réduit, il est vrai, mais notre détermination est forte. Avec saint Paul nous espérons contre toute espérance. Nous en cueillons déjà les prémices. Depuis l’arrivée de Monseigneur l’Archimandrite Elie Nammour à Marseille des choses ont bougé tant sur le plan pastoral que sur le plan social, liturgique, financier et autre. Avec lui notre communauté a évolué et progressé. Elle continuera à le faire. Nous l’encourageons et nous le remercions beaucoup, en votre nom, en notre propre nom ainsi qu’au nom de toute notre Eglise melkite. Que Dieu le bénisse et lui accorde bonne santé et longue vie.

Tout en le félicitant pour sa nouvelle accession au cardinalat, nous remercions Son Eminence le Cardinal Jean-Marc Aveline, Archevêque de Marseille, pour avoir eu l’amabilité de concélébrer avec nous cette liturgie d’action de grâce. Nous remercions à travers lui l’Eglise latine de Marseille pour le soutien et l’aide apportés à notre communauté de Saint-Nicolas de Myre depuis que les premiers melkites ont débarqué dans cette ville accueillante et souriante. Ad multos annos, Eminence.

Nous remercions les autres Eglises, catholiques et non catholiques, ici à Marseille, pour leur solidarité, leur amitié et leur proximité. Ensemble nous témoignons du même et seul Dieu et Sauveur, le Christ notre Seigneur, et le prions incessamment de nous accorder le don de l’unité.

Nous remercions d’une manière spéciale l’Oeuvre d’Orient de France, Mgr Pascal Gollnisch représenté ici par le révérend père Jean-Marie HUMEAU et tous ses collaborateurs, pour l’amour, l’estime et l’aide efficace qu’ils ont toujours portés à notre Eglise melkite et pour l’aide financière spéciale qu’ils ont offerte pour la rénovation de cette église. Le service que cette Œuvre rend aux Eglises d’Orient en France et à l’extérieur de la France depuis plus de 150 ans est inestimable.

Nous remercions Son Excellence Mgr ULRICH représenté ici par le père Jean-Marie Humeau

Nous remercions aussi Madame Martine VASSAL Présidente du département des Bouches-du-Rhônes et de la Métropole AIX-Marseille, pour l’aide finacière accordée pour la restauration.

Nous remercions Madame Fabienne LeCouvreur du ministère de la culture DRAC

Nous remercions Madame Sylvie FABBRO-FOUIN la déléguée au près du patrimoine.

Nous remercions infiniment l’honorable architecte superviseur des travaux de restauration, monsieur Xavier David, et l’équipe des techniciens, des professionnels et des artisans qui ont travaillé à ce projet. Par leur amour, leur assiduité, leur méticulosité, ils ont rendu à notre église sa beauté originelle si attrayante.

Nous remercions Madame la consul Sonia Abou Azar pour son aimable attention.

Nous remercions les amis qui sont venus d’ici et de là pour partager avec nous la joie du bicentenaire. Que Dieu les récompense au centuple.

Nos vifs remerciements vont à vous chers fidèles membres de la paroisse Saint-Nicolas de Myre. Aux bienfaiteurs, et à ceux qui ont préparé avec monsieur le curé les festivités et les activités de ce bicentenaire, docteur Michel Raphael avec l’association Saint Nicolas de Myre 1820.

Un remerciement spécial au révérend père Antoine Haddad ancien curé de cette paroisse, qui a poursuivi les travaux de restauration dès le début.

Chers paroissiens et paroissiennes, c’est sans doute pour vous un moment historique plein de souvenirs et d’émotions, chargé d’espérance et de promesses. L’avenir est devant vous. Le Christ est devant vous. Il vous interpelle vous disant ce qu’il avait dit un jour à Pierre et à ses amis : « Avancez là où l’eau est profonde » (Luc 5 :4).

Joyeux bicentenaire.

le 18 septembre 2022

 

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